Friday, August 3, 2012

un homme qui dort

Parfois, tu rêves que le sommeil est une mort lente qui te gagne, une anesthésie douce et terrible à la fois, une nécrose heureuse : le froid monte le long de tes jambes, le long de tes bras, monte lentement, t’engourdit, t’annihile . Ton orteil est une montagne lointain, ta jambe un fleuve, ta joue est ton oreiller, tu loges tout entier dans ton pouce, tu fonds, tu coules comme du sable, comme du mercure. Tu n’es plus qu’un grain de sable, homoncule recroquevillé, petite chose inconsistante, sans muscles, sans os, sans jambes, sans bras, sans cou, pieds et mains confondus, lèvres immenses qui t'avalent.

Gerges Perec, Un homme qui dort